En 1785, deux jeunes nobles pleins d’esprit, lieutenants du régiment du Roi, le comte de Fortia de Piles et le chevalier Boisgelin de Kerdu, s’ennuient ferme à Nancy. De leur désoeuvrement naîtront cent-vingt lettres écrites sous le pseudonyme de Caillot Duval.
Maniant la flatterie et l’invective, les deux comparses entendent piéger la crédulité et la fatuité de leurs correspondants. Hommes de lettres, maîtres confiseurs, bottier, mère maquerelle, lieutenant de police, actrice de la Comédie, adeptes du magnétisme et du somnambulisme seront tour-à-tour victimes de leurs farces de potache.
Ces lettres connaîtront une première édition en 1795, au lendemain de la terreur, par les soins d’Alphonse Fortia de Piles, rentré d’exil après la chute de Robespierre, alors que son compagnon Boisgelin de Kerdu reste prudemment à l’étranger – deux de ses frères se sont fait raccourcir.
En 1864, puis en 1901, l’érudit Lorédan Larchey dévoile dans deux éditions ultérieures l’identité des auteurs de la supercherie, sous le titre Les mystifications de Caillot Duval. Il ne reprend que quarante-six lettres en les classant par destinataire.
La présente édition reprend, elle, l’intégralité de la correspondance, par destinataire, avec les éclaircissements que Lorédan Larchey apporte dans la préface de sa seconde édition, et ceux de l’édition originale. On trouvera également d’utiles éclaircissements dans divers documents et une postface de Laurent Frontère intitulée Autopsie d’une mystification. Le lecteur pourra convenir que les deux compères et leur entourage sont des maîtres de la mystification et de l’enfumage : on peut ne pas prendre pour argent comptant l’histoire qui nous est servie, mais à présent, les pièces à conviction ont disparu. Une part de mystère demeure et il appartiendra au lecteur de se forger une opinion sur la question.